Le libertarianisme, une opportunité pour le retour d’un Roi, partie 2

Par , Le 12 mars 2024 (Temps de lecture estimé : 9 min)

Et si une société libertarienne était l’opportunité pour le royalisme de revenir sur le devant de la scène et favoriser le retour d’une société à la fois conservatrice et prospère ? C’est la réflexion que je vous propose d’explorer au travers de la suite de cet article, dont la première partie est visible ici.

roico anarcap

Dans la première partie, j’ai rappelé quelques fondamentaux que les libertariens connaissent bien et ne manqueront donc pas aux lecteurs de Re-Possession, mais aussi dressé les bases de ma vision d’une société anarcho-capitaliste dans laquelle s’inscrirait un Roi Catholique. Comme je l’ai écrit dans la première partie de l’article, on pourrait penser que royalisme et anarcapie sont antagonistes, mais il n’en est rien.

Il convient à présent de détailler le rôle et les fonctions de ce roi-entrepreneur et des mécanismes de gouvernance à l’œuvre pour que ce système s’inscrive parfaitement dans le droit naturel.

Rôle et fonctions du roi-entrepreneur

Dans l’optique anarcho-capitaliste, le rôle du roi s’éloigne radicalement de celui d’un monarque. Ce « roi-entrepreneur » se positionne en tant que chef d’une vaste entreprise, offrant une gamme de services régaliens et sociaux, financés par ses activités privées. Cette approche entrepreneuriale signifie que le roi doit gérer ses domaines et ressources non seulement pour en tirer profit, mais aussi pour fournir efficacement des services essentiels à ses vassaux, tels que la défense, la justice et l’infrastructure.

L’un des aspects cruciaux de ce modèle réside dans l’alignement du roi avec les principes catholiques. Sa gouvernance ne se limite pas à l’efficacité économique ; elle est également imprégnée d’une dimension morale et éthique, voire catéchétique. Ce roi-entrepreneur est un défenseur des valeurs chrétiennes, qui guident ses décisions et ses actions. Il incarne l’exemplarité, non seulement dans la gestion de ses affaires, mais aussi dans la promotion de la solidarité, de la charité chrétienne et de la justice au sein de sa communauté.

Ce modèle de royaliste anarcho-capitaliste propose ainsi une fusion entre l’efficacité du marché libre et la richesse morale de la tradition chrétienne. Le roi, en tant qu’entrepreneur, est tenu de prouver son excellence dans les domaines économique et social pour conserver la loyauté et le respect de ses vassaux. Les vassaux, gouvernants de plus petits territoires, suivent un modèle similaire, créant ainsi une structure sociale où la compétence (méritocratie), l’éthique et la responsabilité sont primordiales.

Et plus les services de ce roi seront attractifs, plus des territoires pourraient suivre son leadership et ses règles pour bénéficier desdits services.

Mécanismes de gouvernance dans un contexte néo-féodal

Dans un système anarcap basé sur le néo-féodalisme de droit privé, la structure de gouvernance se manifeste au travers d’un réseau de territoires indépendants. Chaque territoire est gouverné par son propre ensemble de règles volontaires et fonctionne comme une entité autonome. Cette autonomie renforce la notion de vassalité féodale, où des territoires plus petits choisissent volontairement de s’inféoder à un gouverneur d’un territoire plus important ou un roi, afin de bénéficier de protection et de services. C’est l’essence même du fidus, la promesse ou contrat féodal. Non plus entre petits et grands seigneurs de guerre, mais entre individus entrepreneurs. On entre ainsi dans un système carrément organique qu’on pourrait qualifier de modulaire, un territoire pouvant être le vassal contractuel de différents territoires en fonction des propositions des uns et des autres.

Qui dit vassal contractuel dit contrat. Cela signifie donc que si le Roi manque à ses obligations, le vassal peut donc légitimement rompre partiellement ou totalement ledit contrat, jusqu’à faire totalement sécession. Peu importe qu’il s’agisse de continuer seul ou de s’inféoder à quelqu’un d’autre ensuite. C’est aussi dans la capacité à dire « non » que la liberté s’exprime, et donc que le Roi, face à la remise en question légitime des services qu’il apporte et de la vision qu’il défend, se doit d’apporter le meilleur.

Le mécanisme principal de ce système est la concurrence entre différentes entités de gouvernance. Ces entités, qu’elles soient dirigées par un roi ou un gouverneur, doivent constamment démontrer leur efficacité et leur valeur pour attirer et retenir les vassaux autant que les citoyens. Cela crée un marché de services de gouvernance où la qualité et l’efficacité sont récompensées.

Le libre arbitre joue un rôle fondamental dans ce système. Les individus et les territoires ont la liberté de choisir leur allégeance en fonction de leurs préférences, de leurs croyances et de leurs intérêts. Pour autant, un territoire isolé trouverait difficilement sa place dans un maillage territorial basé sur le néo-féodalisme de droit privé. Il serait particulièrement seul et risquerait de péricliter. Ainsi devrait-il s’ouvrir et négocier avec des partenaires, des gouverneurs ou bien les services du roi, et ce afin de trouver sa place sur le marché. C’est donc non seulement le marché qui décide, mais aussi lui qui – si le roi fait bien son travail – préserve l’unité recherchée par le roi et à laquelle il est appelé en tant que roi de droit divin.

Cette dynamique respecte la volonté divine (le principe de libre arbitre) en permettant à chacun de suivre sa conscience. Dans ce cadre, le soutien au roi légitime, guidé par les principes chrétiens, devient d’autant plus un choix conscient plutôt qu’une obligation imposée.

Ce modèle de gouvernance suggère aussi que même si un roi l’est de droit divin, son pouvoir temporel et son autorité doivent quand même être gagnés par le mérite, la compétence et l’adhésion aux valeurs morales et éthiques, plutôt que par la force ou seulement l’héritage. Cela crée un environnement où la responsabilité, la justice et la morale sont des piliers de la société.

Diversité des sources de revenus royaux et éthique catholique

Dans le modèle anarcho-capitaliste, le roi-entrepreneur diversifie ses sources de revenus en embrassant une gamme d’activités économiques, de l’industrie de l’armement à la technologie de pointe. Conformément aux valeurs chrétiennes, ces entreprises ne se limitent pas à des considérations de rentabilité, mais adoptent une approche pragmatique et réaliste des besoins et des défis du monde dans lequel elles s’inscrivent.

Dans l’industrie de l’armement, par exemple, l’accent est mis sur la fabrication d’armes comme un moyen de défense et de protection, aligné avec le droit naturel de se défendre. Cette perspective s’inscrit dans la tradition chrétienne qui reconnaît le droit à la légitime défense tout en prônant la paix et la justice.

De même, dans le domaine de la technologie, les entreprises du roi se concentrent sur l’innovation et le développement qui servent les intérêts des territoires vassaux, en tenant compte des implications éthiques et sociales de leurs produits et services. Ces activités économiques, guidées par une vision chrétienne, montrent comment il est possible d’allier prospérité économique et principes éthiques.

Ainsi, le modèle économique du royaume devient un exemple de réussite dans lequel les intérêts financiers et les valeurs chrétiennes coexistent harmonieusement, démontrant que le succès économique peut aller de pair avec un engagement éthique et moral authentique.

Impact sociétal : charité, solidarité et cohésion sociale

Dans le cadre d’un système anarcap dirigé par un roi-entrepreneur, l’impact sociétal se caractérise par un équilibre unique entre charité volontaire (les gens décident de souscrire à des fonds à vocation sociale), responsabilité individuelle (chacun doit se sortir les doigts du cul) et cohésion sociale (on est tous dans le même bateau) fondée sur des valeurs chrétiennes (ce qui ne veut pas dire devenir chrétien pour autant, d’ailleurs).

La charité est un acte volontaire et non une obligation imposée par un État. Elle est un élément essentiel de la solidarité et de l’entraide au sein de la communauté, reflétant les enseignements chrétiens sur la générosité et l’amour d’autrui. Mais contrairement à l’injuste notion de justice sociale associée à la redistribution forcée des richesses, la charité est un choix personnel. Elle peut être motivée par la compassion et la foi, mais pas forcément. Elle permet aussi aux non-croyants de trouver leur place et de bénéficier de cette charité, qui peut être également financée grâce aux bénéfices engendrés par les services du Roi.

La responsabilité individuelle est également un pilier de ce modèle. Chaque individu est responsable de ses propres actions et de leur impact sur les autres. Cette approche favorise un sens aigu de l’autonomie et de la responsabilisation. Dans une approche catholique de la responsabilité individuelle, le fait qu’une société soit dirigée volontairement par un roi-entrepreneur permettrait l’aboutissement d’une vision chrétienne de la vie en société.

Enfin, la cohésion sociale s’articule autour des valeurs chrétiennes communes. Ces valeurs, telles que l’amour, le respect et la dignité humaine, forment le ciment de la société et renforcent la solidarité entre ses membres. Dans un tel système, la cohésion sociale n’est pas imposée de l’extérieur, mais découle naturellement des relations interpersonnelles entre les individus. Là encore, un tel système permet à des gens de cultures et croyances différentes de trouver leur place, tant qu’ils s’inscrivent dans ce schéma de valeurs.

Conclusion : un modèle pour l’avenir ?

La fusion du royalisme et de l’anarcho-capitalisme, incarnée dans la figure du roi-entrepreneur, offre un modèle de gouvernance innovant. Ce système combine une économie de marché dynamique avec une structure de gouvernance centrée sur les valeurs chrétiennes et la responsabilité individuelle. La question de sa viabilité repose sur l’aptitude du Roi à répondre aux défis qui lui seront contemporains, tout en respectant la liberté individuelle. Notez d’ailleurs que le Roi n’est pas le garant de la liberté individuelle, il doit s’inscrire dedans, pas s’en faire l’arbitre, ce qui rentrerait alors dans un cadre étatiste.

Ce modèle, avec ses mécanismes de gouvernance décentralisés et sa flexibilité économique, a le potentiel de remodeler la société en favorisant l’innovation, la responsabilité et la solidarité fondée sur des valeurs partagées. Toutefois, son succès dépend aussi de l’équilibre entre la liberté et la préservation des valeurs morales et éthiques.

En conclusion, ce modèle anarcho-capitaliste royaliste offre une nouvelle perspective pour l’avenir, tout en réinterrogeant fondamentalement les concepts de gouvernance et de la société. Sa pertinence pour le monde moderne dépendra de sa capacité à allier efficacité économique, justice volontaire (aux chiottes le socialisme), l’unité autour de principes éthiques communs et le respect du Droit Naturel.

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René DROUIN

Auteur d'anticipation, blogueur et créatif touche-à-tout, catho tradi, entrepreneur, THPI. Anarcho-capitaliste repenti du minarchisme, chasseur de woke et de droitard formolé. Mi-ours, mi-panda et re-mi-ours derrière.