Une explosion retentit, plongeant Mike Town dans le chaos. L’ancienne ville paisible est maintenant un champ de bataille infernal. Les soldats doivent avancer, coûte que coûte.
L’explosion de la roquette sur ma gauche me fait voir les étoiles. J’ai le souffle coupé par le blast, les oreilles qui bourdonnent. Je tombe au sol. Putain, il pleut… Je me rends vite compte que ce n’est pas de la pluie mais que l’opérateur radio à 15 mètres de moi, vient de bouffer le tir et s’est transformé en putain de brumisateur.
Empêtré dans mon barda et la vision brouillée par du sang et de la terre, je rampe comme je peux vers un cratère d’obus. Je relève la tête tant bien que mal. L’objectif est devant à 300 mètres. Seulement 300 petits mètres, mais quel sera le prix à payer pour les parcourir ?
Trois minutes se sont écoulées depuis le débarquement, la dropping zone s’est transformée en laboratoire d’équarrissage. Les frappes préventives ont été inefficaces. Ces fils de putes avaient prévu le coup : Trous de combat, fortifications, nid de mitrailleuses, réseau de tranchées, pièges, bref la totale…
Une chose est sûre, on va manger chaud…
Mike Town, l’avant-poste du secteur Mike, super original comme nom. Voila comment ce trou à merde s’appelle. Toute cette planète a été divisée en parcelles par la compagnie d’exploration spatiale qui l’a découverte. Chaque parcelle est ensuite revendue à des colons, des industriels, des prospecteurs, des communautés religieuses et j’en passe !
L’avant poste est composé de modules de vie préfabriqués empilés les uns sur les autres, répartis en blocs séparés par un quadrillage de chemins en terre battue rougeâtre. Une véritable petite ville en plein milieu de la jungle. La quasi-totalité des “bâtiments” sont flanqués “GNC”. GREENNEST CORP, les spécialistes du module de colonisation prêt à l’emploi ! T’as le budget ? Pas de problème, en deux temps trois mouvements, t’as une ville sur mesure qui est larguée depuis l’espace… Putain de progrès !
On a capté les premiers appels de détresse il y a 2 semaines environ. Les transmissions étaient hachées et quasi inaudibles.
Le truc, c’est que les mecs de Mike Town ont souscrit à l’abonnement PREMIUM chez ScavMarines Security, donc forcément la compagnie va mettre le paquet pour résoudre cette merde. On a perdu le contact avec l’équipe de reconnaissance il y a 3 jours, ce qui nous amène à notre opération du jour.
-”Debout manche à couille et avance bordel !”
Le Quartier Maître me tient par le plastron. Son visage sale et ruisselant de sang et de sueur à quelques centimètres du mien.
-”Allez marine ! Bouge toi le fiac, ou j’te licencie pour faute grave façon formulaire 9mm parabellum, avec avis de réception dans ta putain de tête de fils de chienne !”
J’acquiesce pour éviter l’exécution sommaire.
L’air est saturé par le claquement des tirs, les explosions et les hurlements. J’emboite le pas du Quartier Maître qui court comme un diable, arrosant devant lui à la volée avec son fusil d’assaut. Au bout de quelques secondes de course infernale, on arrive sur une position à couvert le long des fortifications de la ville. Plus précisément, les restes d’un ancien véhicule de transport encore fumant d’où s’échappent des grésillements significatifs d’une radio.
-”Zoulou 1, Zoulou 1 de Sierra 4 pour contact … PUTAIN ! Ils sont où ces cons du service aérien ?!”
Une autre escouade, enfin ce qu’il en reste, avait trouvé refuge dans l’épave. A l’intérieur des blessés agonisent, d’autres en position de tir arrosent au hasard en jurant. Dans le fond de l’ancien transport un radio hurle dans son combiné. Il lève la tête en nous voyant arriver :
-”J’crois que ces fils de putes brouillent les comms, on est tous seul Quartier Maître. Va falloir les déloger à l’ancienne boss.”
L’opérateur s’allume une clope en attendant nerveusement une réponse. Les tirs continuant de plus belle. Le ciel orageux, les ruines fumantes, la jungle en feu et l’atmosphère tropicale lourde et humide offrent une toile de fond apocalyptique à tout ce bordel.
Je laisse le “Boss” et “Jean radio” débattre sur la façon dont on va crever… Je me rend compte que je n’ai pas tiré une seule balle… Je m’affale dans un des sièges. Faut que je sorte mon datapad pour essayer d’y voir plus clair et surtout pour recentrer mon esprit.
On a une base de données commune pour l’opération qui rassemble quelques informations sur le job. Mike Town a été fondé il y a 2 ans environ par une communauté scientifique spécialisée en biologie et botanique issue d’une branche de Lebel Tech. Rien de spécial en soit, mis a part que l’avant poste comptait environ quelques centaines de familles soit quasiment mille colons. J’essaye de distinguer au travers d’un trou dans la carlingue, une cible, un contact, quelque chose sur quoi tirer. Mais rien. La ville est un putain d’Alamo fumant. Les rues sont jonchées d’épaves de véhicules, les modules de vie criblés d’impacts. Rien qui bouge. Quelque chose cependant attire mon regard. un tag rouge sombre, sur un mur, écrit à la va vite : “NOTRE”.
C’est quoi cette merde encore ?
La radio crépite à nouveau figeant la scène instantanément :
-”….Sierra 4…frégate…SMCS Jack Slater… bi..en pris coord…bombardement orbitale… à couvert…”
Tous s’échangent des regards incertains mais une chose est sûre, Mike Town va manger très chaud…