L’inégalité n’est pas un mal en soi

Par , Le 26 janvier 2025 (Temps de lecture estimé : 13 min)

Loin d’être une injustice à combattre, l’inégalité est un moteur de progrès et de création de richesse. Ce ne sont pas les différences qui posent problème, mais l’injustice et la coercition qui les faussent. Découvrez pourquoi l’égalité imposée est une illusion dangereuse et comment la liberté d’échanger et d’entreprendre bénéficie à tous.

impot gateau

 

En premier lieu, une inégalité à la naissance n’est pas forcément un problème. Par exemple, sans parler de capital monétaire, nous naissons inégaux sur le plan de la beauté. Certaines personnes naissent belles, d’autres naissent laides. Est-ce que cela signifie que les personnes belles ont volé leur beauté aux personnes laides ? Serait-il juste de jeter de l’acide au visage des personnes belles pour que tout le monde soit au même niveau de beauté (si tant est qu’on puisse objectivement quantifier la beauté) ? Ou pensez-vous que si on trouvait un moyen de transférer la beauté des personnes belles aux personnes laides, il y aurait création de richesse au global pour tous ?

C’est la même chose avec les inégalités de richesse : l’économie n’est pas un gâteau dont on se partage les parts, c’est une vision fausse et statique de l’économie. Chaque fois que des personnes entrent dans un échange (et par définition un échange est forcément consenti des deux côtés) il y a création de richesse et augmentation du volume du gâteau.

A titre personnel, je pense que cette vision statique de l’économie s’explique en partie parce que les gens ont intuitivement en tête, lorsqu’ils pensent l’économie, la phrase de Lavoisier qui dit « rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme« . Cette phrase est vraie en science physique mais pas en science sociale. Un bon exemple est la création de nouvelles connaissances. Depuis des milliers d’années, les hommes ont engendré de plus en plus de connaissances nouvelles sur le monde et eux-mêmes, preuve qu’ils sont capables de créer une richesse supplémentaire qui n’existait pas avant (si on considère la connaissance comme une richesse).

Donc quand un capitaliste fait du profit, ce n’est pas au détriment des clients ou des salariés. Le profit n’est pas la preuve d’une exploitation ou d’une arnaque insidieuse, c’est justement l’indicateur qui révèle que des services ont été rendus aux clients. A contrario, la perte indique que le capitaliste n’a pas su rendre des services, qu’il n’a pas su trouver sa clientèle et il est donc normal qu’il se fasse éjecter du marché au profit d’un meilleur concurrent qui sert mieux les intérêts de la communauté. On notera que le socialisme n’explique pas comment un établissement public pourrait faire faillite.

Pour mieux illustrer cette histoire d’échange générateur de richesse, je vais prendre l’exemple du boulanger. Si le client paye sa baguette de pain 1 euro c’est qu’il a jugé subjectivement que sa pièce d’1 euro valait moins que la baguette de pain. A contrario, côté boulanger, si ce dernier cède sa baguette contre la pièce d’1 euro, c’est parce qu’il a jugé que sa baguette valait moins que la pièce. En effet, pour lui, fabriquer du pain c’est facile, contrairement au client qui n’a pas que ça à faire de fabriquer son propre pain. Les deux y trouvent un gain de temps (c’est ce qu’on appelle la division du travail et cette spécialisation profite aux deux parties comme le montre la loi des avantages comparatifs) et c’est justement parce qu’il y a inégalité d’intérêts des deux côtés que l’échange a pu se produire. Il s’agit d’un échange gagnant-gagnant. La démonstration par l’absurde consiste à dire que si ce n’était pas le cas, si les deux n’y trouvaient pas leur intérêt, ils auraient préféré ne pas interagir ensemble, ils seraient restés chacun dans leur coin en autarcie.

La plupart des gens pensent qu’un échange se produit parce que les deux individus se sont mis d’accord sur le fait que leurs biens étant d’égales valeurs, ce qui est faux. Si vous vous apprêtez à échanger vos chaussures contre un livre mais en considérant que vos chaussures ont exactement la même valeur que le livre, dans ce cas-là pourquoi entreriez-vous dans cet échange ? Iriez-vous dans un magasin pour échanger votre billet de 5 euros contre un autre billet de 5 euros ? En réalité, lors d’un échange il n’y a pas une égalité mais une double inégalité inverse.

bon ou mauvais echange
La bonne et la mauvaise manière d’envisager un échange

 

Ca peut donc paraître contre-intuitif mais c’est l’inégalité qui permet léchange donc la création de richesse. Si nous étions tous des fourmis ayant exactement les mêmes besoins et aspirations, nous ne serions pas capables de générer de la richesse, nous aurions déjà tout ce dont nous avons besoin mais nous n’aurions plus d’individualité et de liberté/conscience. Par définition, nous n’avons rien à échanger avec son clone.

Cependant il existe un autre type de relation entre les hommes qui lui est gagnant-perdant : l’agression. Si on reprend l’exemple de la boulangerie, imaginez que le client (ou le boulanger) se pointe avec un flingue et oblige l’autre à entrer dans un échange forcé (un échange forcé étant déjà un oxymore). Dans ce cas de figure, celui qui a le flingue y gagne mais par contre on a aucune garantie que celui qui se fait braquer y gagne (cela s’explique par le fait que la valeur économique qu’on attribue aux biens/services est toujours subjective). Peut-être qu’il aurait préféré investir son énergie dans une autre activité qu’il aurait jugé plus importante, le seul moyen de le savoir aurait été de ne pas le contraindre physiquement. Il s’agit alors d’un jeu à somme nul, ce que l’un gagne l’autre le perd, il y a transfert de richesse mais il n’y a pas génération de richesse des deux côtés, génération qui aurait pu profiter aux deux parties et à la société dans son ensemble. La relation état-contribuable est une relation gagnant-perdant puisqu’on a aucune garantie que le contribuable consente à l’impôt (essayez de vous « désabonner » de l’impôt pour voir 🙂).

Et pour bien enfoncer le clou, histoire de vous faire comprendre que les inégalités de richesse ne riment pas forcément avec vol/injustice, je vais prendre l’exemple historique de l’exode rural. Les européens du XIXème siècle qui sont nés dans les campagnes ne sont pas sortis du ventre de leurs mères avec un bleu de travail. Ils ne sont pas nés avec un « droit à travailler dans une usine ». C’est parce que des entrepreneurs ont décidé d’investir leurs capitaux privés (ou celui des investisseurs qui ont bien voulu prendre le risque de leur prêter leur argent) dans la construction d’usines que les ouvriers sont apparus, pas l’inverse. Avant la révolution industrielle des villes, les paysans avaient le choix entre être paysan ou être paysan. Avec l’apparition des usines, ils ont eu le choix entre être paysan ou être ouvrier. Les capitalistes ne leur ont pas mis un flingue sur la tempe pour les forcer à venir en ville travailler dans les manufactures. La révolution industrielle a simplement augmenté le panel de choix possibles des individus, et si cet exode ne leur était pas favorable, ils se seraient contentés de rester en campagne (on revient à l’exemple du boulanger et du client).

Beaucoup de gens aujourd’hui vont déplorer les conditions de travail de l’époque (et je pense à raison). Néanmoins personne ne se pose la question de pourquoi ces paysans ont continuellement fait le choix d’aller vers la ville plutôt que de rester à la campagne. Je ne connais pas toutes les raisons qui les ont poussé à l’exode rural (je ne suis pas dans leurs têtes) mais manifestement si des millions de personnes ont fait ce choix c’est qu’ils devaient trouver un intérêt supérieur à travailler à l’usine plutôt qu’à la campagne. Parce que oui, par idéalisation de la vie à la campagne, les gens oublient que travailler la terre, c’est extrêmement pénible, surtout avec les conditions de l’époque. Une piste pour expliquer ce choix je dirais, c’est la stabilité des revenus. Lorsque tu es agriculteur, ton niveau de vie dépend du rendement de tes récoltes, la nature étant capricieuse on peut rapidement se retrouver en situation de disette si on n’a pas de chance. Alors qu’en tant qu’ouvrier, tu as un salaire mensuel qui varie moins. Une meilleure stabilité économique permet de mieux se projeter dans l’avenir. De plus, en ville, les gens ont un meilleur accès aux bénéfices de la société de consommation qu’en campagne puisque tout est plus proche. La révolution industrielle a permis l’émancipation de plus en plus d’européens via la création de richesse, et elle continue de le faire pour les pays en voie de développement aujourd’hui.

L’objectif n’est pas de gommer les inégalités mais de gommer la misère humaine, et le libéralisme n’a plus rien à prouver historiquement sur ce point, l’extrême pauvreté disparaît partout où l’économie de marché n’est pas entravée par le socialisme, toutes les statistiques vont dans ce sens.

 

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Pic civilisationnel permis par le capitalisme et les progrès de la mécanisation

 

Néanmoins je tiens à nuancer mon propos sur cette histoire d’exode rurale. Il y a un cas particulier qui est celui du mouvement des enclosures en Angleterre. Certains paysans, dans certaines régions d’Angleterre, ont été contraints physiquement à partir vers les villes parce que des propriétaires terriens les en ont expulsés. Il s’agit clairement ici d’un acte antilibérale que tout véritable libéral condamnera puisqu’il y a manifestement viol de propriété privée. Les enclosures ne sont pas un contre argument contre le libéralisme, au contraire : si les propriétaires terriens ont pu exproprier ces terrains aux paysans, c’est justement parce qu’ils ont eu l’état derrière eux qui les y ont autorisé via l’enclosure act. On voit bien ici un exemple de capitalisme de connivence, où des acteurs privés s’associent avec les acteurs politiques (qui détiennent le monopole de la violence légale illégitimement) au détriment des droits des individus. Ce capitalisme de connivence est dénoncé par les libertariens, et il faut bien comprendre que si ces abus existent ce n’est pas à cause des processus capitalistiques mais à cause de la présence de l’état et surtout, surtout, parce que l’état apparaît comme légitime aux yeux de la population (ce que Etienne de la Boétie appelait la servitude volontaire). Au-delà de ça, c’est un phénomène restreint uniquement à certaines régions d’Angleterre et qui n’explique pas au global pourquoi il y a eu de l’exode rural partout en Europe (et pourquoi il y en a de nouveau aujourd’hui dans le tiers-monde).

Ah et aussi dernière chose (quitte à écrire un énorme pavé autant y aller à fond) je trouve que la position anti-riche est profondément hypocrite. Lorsque des travailleurs vont manifester contre les riches, je ne peux pas m’empêcher de penser que du côté des travailleurs honnêtes et intègres, il doit y avoir une sorte de malaise intérieur. En effet, au fond, pourquoi travaillons-nous tous ? Pour la majorité, nous travaillons (càd vendons nos services aux employeurs quand on est employé ou aux clients quand on est employeur) pour “mettre bien” nos enfants et nos petits enfants. Nous accumulons du capital pour pouvoir ensuite en réinvestir une partie dans les études de nos enfants pour leur donner accès à un meilleur niveau de vie, c’est humain et moralement juste. Que des gens y réussissent mieux que nous (où que leurs ancêtres y aient mieux réussi) n’est pas vraiment un problème dans la mesure où cet argent, ils ne l’ont pas volé comme nous l’avons vu.

Dans une économie de marché libre (càd avec moins, voir sans aucune intervention de l’état) le seul moyen de s’enrichir c’est de rendre un maximum de services aux autres (vous noterez d’ailleurs que dans mes démonstrations je n’invoque jamais la notion de mérite, le mérite existe mais c’est une notion qui est subjective donc inintéressante pour un scientifique, l’enrichissement vient du constat manifeste que des services ont été rendus et ce sont les consommateurs qui choisissent qui ils enrichissent sur le marché, le marché étant la somme de toute ces intersubjectivités).

Dès lors, imaginez que vous soyez celui qui réussit à s’enrichir plus que son voisin. Où que votre enfant ait réussi à plus s’enrichir. Vous allez militer contre l’enrichissement de vos propres enfants ? C’est hypocrite de reprocher aux autres ce que vous-même essayez d’accomplir au quotidien. En fait ce qui dérange les socialistes de tout poil, ce n’est pas l’existence des riches, c’est qu’ils ne soient pas eux-mêmes riches

Donc quand des enfants de riches reçoivent l’héritage de papa maman, on s’en contrefout puisque cet argent a été gagné et transféré légitimement, sans violence, de génération en génération. D’ailleurs on occulte souvent le fait qu’avoir de l’argent ne garantit pas de le maintenir. Des riches deviennent pauvres et des pauvres deviennent riches plus souvent que vous ne le croyez. Et c’est justement quand la société devient de plus en plus socialiste que l’ascenseur social se bloque (à titre d’exemple, si l’ascenseur social fonctionnait beaucoup mieux durant les trente glorieuses par rapport à aujourd’hui, c’est tout simplement parce qu’à l’époque l’état français ne pesait pas encore 60 putain de % du PIB).

Néanmoins, si lorsqu’on fait la généalogie de ces transferts financiers de génération en génération on trouve des enrichissement personnels via expropriation (par exemple des entrepreneurs qui ont fait fortune grâce à la politique coloniale des états) alors oui dans ce cas cet héritage est illégitime puisqu’il s’est constitué au détriment du consentement d’autrui. Et il est probable que parmi les milliardaires, la quasi totalité ont touché cet argent « sale ». C’est pour ça que les anarcho-capitalistes sont très critiques de types comme Musk ou Arnault: ils sont en connivence totale avec les entités étatiques, via lobbyisme et autres aides aux entreprises.

 

Mais le problème ce ne sont pas les riches, le problème ce sont les politiques. Il ne tient qu’à vous ne pas tomber dans le piège tendu par les politiciens socialistes (de droite comme de gauche) qui n’espèrent qu’une chose : que vous vous trompiez d’ennemis, afin que vous puissiez les autoriser à avoir plus de pouvoir politique sur l’ensemble de la société via ce système de racket industrialisé qu’on nomme l’impôt. En régime socialiste, ceux qui ont réellement le pouvoir ce ne sont pas les riches qui essayent de s’enrichir sur le marché légitimement, ce sont ceux qui sont aux commande du système de redistribution coercitif, c’est à dire les politiciens, les entreprises de connivences, les artistes subventionnés, les journalistes subventionnés, les universitaires subventionnés, les associations subventionnées, les syndicats, les fonctionnaires et la police de l’état. Le vrai problème ce n’est pas l’inégalité, c’est l’injustice.

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