Le Titanic, puissance et permanence d’une histoire élevée au rang de mythe.
C’est bien évidemment Cameron et son majestueux film de 1997 qui a remis le Titanic en selle. En effet, on parle peu de l’affaire tout au long de l’après-guerre, tant les traumatismes vécus semblent avoir relégué au second plan les fastes et les tragédies de la Belle-Epoque.
Le Titanic de Cameron est un monstre de l’histoire du cinéma.
Encore aujourd’hui 3e au Box-office mondial, 200 millions de dollars de budget, durée de 195 minutes, des décors colossaux qui coulent avec des dizaines de figurants (les effets numériques sont alors à peine en cours de prise en main par l’industrie du cinéma), des images réelles de l’épave, un staff de spécialistes de choc en appui, une bande originale marquante, etc.
Surtout la période qui suit les sorties en salle est propice à la réédition de toutes sortes d’ouvrages. On republie La nuit du Titanic de Walter Lord et l’étrange Futility de Morgan Robertson. Avec le Web naissant et les modems à domicile, ce sont des groupes de passionnés qui se constituent sur les forums. Le jeu de Cyberflix Titanic, une aventure hors du temps sort à la même période (un jeu d’enquête exceptionnel se déroulant à bord du paquebot).
Bref, une génération de Titanicôlatres se constitue. Et cette génération, soutenue par on ne sait quelles forces souterraines, est extrêmement productive encore aujourd’hui. On peut évoquer l’énorme et extraordinaire projet Honor and Glory par exemple.
Surtout, ce qui est marquant, c’est d’observer l’enthousiasme et la passion que suscite encore aujourd’hui le Titanic, ce plus de 110 ans après sa disparition dans les eaux sombres et sans fonds de l’Atlantique.
Mais que se passe-t-il donc autour de ce navire englouti? En effet, les épaves se comptent bien par milliers. Qu’est-ce que ce navire et son histoire peuvent bien avoir de si spécial?
Et bien justement, du spécial, du bizarre, avec le Titanic il n’y a que ça.
Second d’une série de trois transatlantiques, la fameuse classe Olympique, le Titanic est bien le navire le plus grand, le plus lourd et le plus luxueux au monde lors de son lancement. Qui plus est, son naufrage ne se déroule ni plus ni moins que lors de son voyage inaugural. Et ce en heurtant un iceberg, ce qui est un événement très rare. Et en plus il aura fallu que les dégâts soient suffisamment lourds pour le couler. Bref, les éléments aptes à forger un mythe sont déjà ici présents.
Au-delà de la malchance tout bonnement incroyable de ce navire, d’autres éléments peuvent nous pousser à réfléchir.
Souvent qualifié de premier désastre de l’ère industrielle, le naufrage du Titanic, nom des premiers dieux chassés par Zeus, est bien plus que cela, il est une allégorie de ce qu’est l’Occident. Une civilisation technique, portée par désir sans cesse renouvelé de repousser les bornes… et qui souvent se brûle les ailes.
Le Titanic, symbole de la technique triomphante, mais contrariée, est une légende prométhéenne où se mêlent l’acier et les hommes, le feu et la glace. C’est une légende purement européenne et exempte de toute forme de wokisme. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard, comme un message prémonitoire, si cette affaire se déroule quelques mois seulement avant l’éclatement du premier conflit mondial, suicide européen de masse.
Surtout, le Titanic nous révèle ce que nous avons perdu. Pour ce faire, il suffit de comparer les comportements des passagers de 1912 avec ceux du Costa Concordia, en janvier 2012. D’un côté, un naufrage à des centaines de kilomètres des côtes canadiennes, sans espoir de secours rapides. Aucun mouvement de panique, sauf aux ultimes instants. De l’autre, un échouage côtier, à proximité immédiate du port de Giglio. Résultat, une panique monstre pour rejoindre les embarcations de sauvetage.
Christophe LAVIGNE
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