Aller sur Mars – I – Monopole du Grand Voyage ?

Par , Le 16 janvier 2025 (Temps de lecture estimé : 5 min)

Elon Musk, Mr. SpaceX, n’en finit pas de faire franchir des bonds à la technologie qu’il assemble en vue du Grand Voyage vers la Planète Rouge. Ce rêve fou, qui a déjà fait briller les yeux et suscité l’espoir de tant d’auteurs et de simples Terriens, paraît chaque mois un peu plus proche de demain.

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Avançons dans quelques mois, ou quelques années. Musk aura su faire de la mise en orbite de nouvelles charges une vulgaire routine. Peu à peu, il pourra assembler une station orbitale qui sera son usine à vaisseau spatial et sa base de lancement pour le Grand Voyage vers notre rouge Voisine. Quelques années encore et les allers-retours lointains seront presque de la banalité. Merveilleuse progression et fantastique espoir pour l’humanité et ses désirs de vie nouvelle, de vie en Liberté.

Il se pourrait pourtant que ce scénario ne soit pas aussi idyllique qu’il y paraît. Car pour que la Liberté soit, il faut que la concurrence la concrétise. Sans concurrence, comment pourrions-nous être sûrs que ce Nouveau Monde ne sera pas, dès le premier pied mis au sol, la prochaine prison de luxe ? Comment être sûrs que les premiers passagers auront pour mission de bâtir la première Libéralie ? Comment être sûrs que les premiers hommes ne seront pas des hommes de l’état en conquête ?

La concurrence naturelle verrait un scénario où quelque autre entrepreneur génial et fortuné irait emboîter le pas à Musk avec son propre programme spatial. Plusieurs entrepreneurs et plusieurs programmes, peut-être. De nouveau, apprendre à faire des fusées ; de nouveau, apprendre l’envol et le retour ; de nouveau, apprendre à mettre en place une usine orbitale et sa plateforme visant Mars.

À ce jour, la chose n’est pas impossible, mais elle semble fort improbable. Car un tel projet suppose de disposer d’un capital colossal pour le financer. Comme il est expliqué dans la série sur le capital d’une entreprise, (*) il faut des clients pour financer une entreprise, ou assez de capital pour l’aider à tenir jusque-là. Musk n’a pas encore de clients,(**) il se finance en grande partie par des commandes de la NASA, c-à-d de l’argent public prélevé sur la fiscalité des citoyens américains et sur les revenus de l’inflation (via l’effet Cantillon) organisée par la FED. On est bien loin du capitalisme, mais passons. (***)

Les concurrents à SpaceX devront donc soit eux aussi profiter de l’argent public, soit trouver des astuces pour convaincre leurs futurs voyageurs de payer leurs places très, très longtemps à l’avance. Ou bien financer leurs investissements avec l’argent gagné à d’autres activités, ou via des mécènes.

Si ce scénario est improbable, quelle est alors l’alternative ? Pour ma part, je n’en vois qu’une, mais elle me semble bien plus probable. Il suffit qu’Elon Musk lui-même mette sa concurrence en selle. Quand on perçoit combien le Personnage tient à la Liberté, on se dit qu’il y a peut-être déjà pensé.

Quelle est l’idée ? Je vois deux aspects. Le premier concerne la « propriété intellectuelle ». Elon Musk ne peut pas apporter de capital financier à ses outsiders, car alors il n’y aurait pas de véritable concurrence dans les prises de décisions les plus importantes. Par contre, il peut les aider à éviter de devoir tout apprendre, de devoir tout réinventer. Une manière élégante de propulser ses challengers serait ainsi de mettre tous ses brevets, tous ses logiciels, toutes ses données expérimentales dans le domaine public, en open source par exemple. La course se ferait alors sur les meilleurs à produire.

L’autre aspect concerne la NASA, et ses subventions publiques en général. Au fur et à mesure que toute son infrastructure spatiale prendra forme et que la promesse de prochain Grand Voyage se fera crédible, il pourra vendre des billets, prendre des souscriptions, vendre de la publicité, bref, diversifier ses sources de financement. Et peu à peu envoyer gentiment balader la NASA et ses sbires, les tentacules du Deep State qui chercheront forcément à prendre le contrôle de sa belle machine.

J’entends déjà les critiques. Stéphane est fou, pourquoi Elon Musk prendrait-il de telles décisions ? Pourquoi cet homme brillantissime devrait-il se faire harakiri alors même qu’il serait si près du but ?

Parce que s’il ne le fait pas, de cette manière ou d’une autre, qu’importe, il aurait alors apporté sur un plateau à la Pieuvre le Monopole du Grand Voyage et avec lui la certitude que Mars deviendra, un jour prochain, le cinquante-et-unième état des États-Unis. Parce qu’il aurait aussitôt ruiné la Mission pour l’Humanité de toute son aventure spatiale. Parce que SpaceX ne fait sens que si la Liberté peut voyager comme le flambeau des premiers hommes qui risqueront leurs vies à traverser l’Espace.

À suivre…

Stéphane Geyres

 

(*) Voir : https://liberalie.substack.com/p/le-capital-financer-lentreprise

(**) Il faut bien voir que si la NASA le finance ainsi, c’est qu’elle espère bien prendre au final le contrôle des vols vers la lointaine planète…

(***) Pour être plus correct, les contrats publics sont principalement liés au Starship, ce qui m’importe le plus ici, néanmoins Falcon 9 a une majorité de contrats « privés », pour des satellites par exemple.

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Stéphane GEYRES

Stéphane Geyres est autodidacte de la Liberté. Sur son chemin, il a écrit ou édité 5 livres - dont Liberté Manifeste - co-fondé le site Libéralie, les Editions John Galt et l'Institut Mises France.